Quelques musiques du nord et nord-est du Brésil

Publié le 16 Mai 2013

Pour sortir des sentiers battus de la musique brésilienne, voici quelques grands classiques des musiques du Nord et Nord-est du Brésil. Pas des curiosités sympathiques mais bien des grands artistes consacrés comme tels au Brésil mais qui ne se sont pas exportés au-delà de ses frontières.

 

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Ceux qui s'intéressent à la musique brésilienne ont peut-être remarqué l'explosion récente de la musique Paraense, et notamment de la tecnobrega. L'Etat du Pará est aussi le berceau de la guitarrada et de la lambada qui sont en quelques sortes les réponses brésiliennes à la cumbia colombienne. Mais encore avant ça, le Pará, et plus particulièrement l'île de Marajó est la terre du carimbó, un genre tout aussi rythmé que ses avatars modernes mais totalement dépourvu du moindre gramme de kitsch.

Le carimbó est une musique et une danse comme tant d'autres issue de la rencontre toujours fascinante en Amérique entre les musiques africaine, européenne et amérindienne, avec pour le carimbó un fort parfum amazonien. D'ailleurs le mot carimbó vient de la langue amérindienne tupi.

 

Une des figures fondatrice du carimbó est Mestre Verequete. Un grand et humble Monsieur aujourd'hui reconnu à sa juste valeur mais qui a passé sa vie bien loin des lumières du show-business. S'il a fondé son groupe Uirapuru en 1971 avec lequel il a enregistré quelques albums, il a toujours travaillé à côté de sa carrière pour subvenir à ses besoins, comme contremaître assistant, boucher ou vendeur de grillades (churrasquinho)... tout en créant un immense répertoire chanté dans tout le Pará et au delà. 

Ecoutez donc ces percussions puissantes et originales jouées par les tambours curimbós, relevés de banjo, trompettes et de la voix sans pareille du maître Verequete.

Une chanson qui appelle l'orixa Verequete (divinité de la religion tambor da mina) et qui a donné son surnom à Mestre Verequete.

Mestre Verequete - Chama Verequete (O legitimo carimbo, 1975)

Une chanson par laquelle Mestre Verequete rend hommage à l'Ile de Marajó dont est originaire le carimbo. Une immense île dans le delta de l'Amazone, peuplée d'un demi millions d'habitants!

Mestre Verequete - Ilha de Marajó (Carimbó - Dance Music from Pará, Amazonia, Wergo 2000)

  Mestre Verequete - Cachorro caçador (O legitimo carimbo, 1975)

 

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La Bandinha de Pífanos de Caruaru est un groupe dont l'histoire est une véritable saga familiale. Ses origines remontent aux années 1920 dans le Nordeste quand Manoel Clarindo Biano, joueur de tambour zumbumba appris à deux de ses enfants Benedito et Sebastião à jouer de la petite flûte typique, le pifano, un instrument qu'il avait lui même hérité de son père. La petite famille commença à jouer dans des fêtes locales et religieuses et mênait une vie quasi nomade, se fixant quelques mois à quelques années quelque part avant de repartir sur les routes. La famille s'installa définitivement à Cararau en 1939. Le père aurait demandé à ses enfants de continuer le groupe à sa mort, souhait respecté puisqu'il est encore actif aujourd'hui!

Les enregistrements de références datent des années 70 et connaitront un certain succès au Brésil. La Banda de Pífanos de Caruaru jouera même avec Gilberto Gil sur son classique album Expresso 2222 de 1972.

Le son du groupe est complétement unique, construit autour de percussions (zabumda, surdo, caixa) et bien sûr des pifanos, petites flutes connues en France sous le nom de fifres qui sont l'âme de cette bandinha. Un foisonnement de rythmes populaires dans le Nordeste (frevo, baião mais aussi valse et marche) magnifiées par des pifanos assez incroyables, d'une virtuosité sans emphase ni esbroufe.

La bataille entre un chien et un jaguar.

Bandinha de Pífanos de Caruaru - Briga do cachorro com a onça

Un morceau en hommage à de la ville de Caruaru, capitale de l'Agreste.

Bandinha de Pifanos de Caruaru - Caruaru caruará

Une chanson sur le père Cícero, un prête extrêmement populaire, et qui fait l'objet d'une énorme dévotion, aujourd'hui considéré comme un saint par des millions de Bréiliens.

 Bandinha de Pifanos de Caruaru - Bendito Padre Cicero

 

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Papete est un grand percusionniste de l'Etat du Maranhão originaire de la ville de São Luis. Il est l'auteur durant les années 70 de plusieurs albums qui ont été des grands succès dans tout le Brésil. Je vous présente le superbe Bandeira de Aço de 1978. Les compositions sont signées Josias Sobrinho et César Teixeira pour un album court mais habité du début à la fin. Papete et ses musiciens jouent une musique à la fois marquée années 70 dans la production et les arrangements, tout en étant profondément ancrée dans la culture maranhense, au niveau musical mais aussi par les thèmes qui évoquent par exemple la très célèbre fête locale du Bumba meu boi.

 

Papete - Boi de Catirina (Bandeira de Aço, 1978)

Papete - Dente de Ouro (Bandeira de Aço, 1978)

Papete - Flor do Mal (Bandeira de Aço, 1978)

 

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Passons à des enregistrements plus contemporains mais aussi paradoxalement plus traditionnels avec quelques chansons de côco et maracatu, des styles du Pernambuco assez méconnus en France mais qui nourrissent la musique populaire de tout le Nordeste. Les chansons qui suivent sont issus d'une formidable série de compilations éditée par l'Etat du Pernambuco pour promouvoir sa musique mais qui ne sont à ma connaissance pas commercialisé (Música de Pernambuco).

Un groupe originaire du quartier d'Amoro Branco dans la ville d'Olinda et composé d'Ana Lúcia, de mestre Dedo et de mestre Ferrugem. Tout le monde a de l'amour nous chante-t-ils.

Coco Do Amaro Branco - Todo mondo tem amor

Le chien du patron est mieux traité que les employés, dénoncent le duo Antônio Caju et Caetano da Ingazeira, duo de maracatu et d'embolada.

Antônio Caju e Caetano da Ingazeira - Cachorro Do Patrão

Loin des thèmes associés à une musique qui sonne très traditionnelle, João Paulo et Barachinha nous parlent d'échographie, d'ordinateur et de téléphone portable...

João Paulo E Barachinha - Tecnologia

 

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Elomar est un grand musicien profondément singulier. On le dit influencé par les traditions médiévales ibérico-arabes. Je ne saurais juger. Mais nul doute que sa musique magnifie cette campagne où vit Elomar qu'on imagine volontiers aride et sauvage, mystique et hors du temps. Silvio lui a consacré quelques belles traductions.

L'album que je vous présente est il faut le noter produit comme les précédents du Banda de Pifanos et de Papete par Discos Marcus Pereira, le plus important label indépendant de cette époque au Brésil à qui l'ont doit non seulement plusieurs chefs d'oeuvre de samba et choro (Pixinguinha, Cartola ou Paulo Vanzolini parmi tant d'autres) mais aussi quelques disques fondamentaux qui ont documentés la richesse culturelle du Nord du pays.

 Place au ménestrel du sertão!

Elomar - Tirana (Na Quadrada Das Águas Perdidas, 1979)

Elomar - Puxilias (Na Quadrada Das Águas Perdidas, 1979)

Elomar - A Meu Deus Um Canto Novo (Na Quadrada Das Águas Perdidas, 1979)

Rédigé par Boeb'is

Publié dans #Brésil

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C
<br /> parfait et très utile de sortir des sentiers battus et rebattus<br />
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